OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 La cyberpropagande d’Obama et Romney http://owni.fr/2012/11/02/la-cyberpropagande-dobama-et-romney/ http://owni.fr/2012/11/02/la-cyberpropagande-dobama-et-romney/#comments Fri, 02 Nov 2012 13:32:59 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=124904

Mr et Mrs Sinker, mari et femme, assis sur un même canapé à Chicago, ont reçu en mars dernier le même mail de l’équipe de campagne de Barack Obama. Le même, à un détail près : M. Sinker se voyait proposer un don de 20$ et madame, de 25$. Une simple ligne corrigée automatiquement par une machine ayant eu accès à une information cruciale : Mme Sinker, 61 ans, avait auparavant été identifiée comme une grosse donatrice dans les fichiers du parti démocrate.

Analysés par ProPublica, les mails d'appel aux dons envoyés par l'équipe d'Obama en mars 2012 montraient des différences notables dans la formulation et les sommes demandés, selon que les sympathisants étaient enregistrés comme déjà donateurs ou non.


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Décortiqué dans un graphique (voir l’illustration ci-dessus), ce cas d’école a été le départ d’une opération de reverse engineering (déconstruction d’un processus technologique) des “mail machines” des principales équipes de campagne. Si la première version du mail s’adressait en part égale à des hommes et à des femmes, donateurs réguliers ou non, pour une somme faible, la version 4 n’a été reçue que par des militants ayant déjà versé de l’argent, majoritairement des femmes, et proposait des montants allant de 0 à 300 dollars. La 5emouture, elle, s’adresse principalement à des hommes, seulement au-dessus de la trentaine et pour des petites sommes.

En faisant appel à ses lecteurs pour qu’ils partagent tous les mails reçus de la part des deux équipes de campagne, les journalistes du site ProPublica ont mis en place un système d’analyse comparative des différents mails envoyés avec pour objectif de prouver que ces équipes avaient recours à des systèmes automatisés de microciblage des militants.

Le 7 juillet, le site a ainsi analysé trois envois de l’équipe d’Obama. Grâce aux données récoltées par ProPublica, les journalistes ont pu classer les mails par “donation signal”, c’est-à-dire selon les montants des dons proposés lors des précédents mails. Aux profils gros donateurs, habitués aux mails demandant 220 à 280 dollars est envoyée une version remplie de liens de dons en un clic, prélevant automatiquement la somme proposée sur le numéro de compte enregistré. Pour les petits donateurs, bombardés de demandes de dons à moins de $40, il faut passer par une URL. Une preuve de la génération de mail “sur mesure” selon un critère renseigné dans les bases de données des partis.

Dans cette frise réunissant tous les mails transmis à ProPublica, chaque barre correspond au volume de mail envoyé par chaque équipe un jour donné, sa couleur correspondant à le nombre de variation par mail (tirant vers le rouge pour les plus optimisés).

Si l’analyse est encore en cours et les outils s’affinent au fil des jours, un résumé général donne à voir le bilan des mails déjà scannés. De mars à aujourd’hui, la quantité de mails est représentée pour chaque jour par une barre colorée, sur la ligne de l’expéditeur, dont la couleur change en fonction du nombre de variations, tirant vers le rouge pour les mails proposant le plus de versions différentes. Et dans les sondages comme dans l’utilisation des bases de données, Barack Obama semble conserver une avance certaine.


Illustration via la galerie Flickr de Nick Jugular [CC-byncsa]

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Veolia coupe le robinet d’un syndicat http://owni.fr/2012/06/08/veolia-coupe-le-robinet-dun-syndicat/ http://owni.fr/2012/06/08/veolia-coupe-le-robinet-dun-syndicat/#comments Fri, 08 Jun 2012 08:58:08 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=112813

La direction régionale pour l’Île de France de Veolia Eau bloque les mails de ces syndicalistes un peu trop critiques à son goût. Pendant trois mois l’accès à la messagerie interne des représentants de Force ouvrière au sein de l’entreprise a ainsi été suspendue. Et le syndicat a décidé de porter l’affaire devant le tribunal des référés, qui examinait sa plainte ce mardi 5 juin. Depuis le 8 mars dernier, impossible de recevoir ou d’envoyer le moindre communiqué aux salariés de la filiale régionale, suite à une lettre de la direction des ressources humaines que s’est procurée Owni. Le contentieux porte sur le contenu d’un seul et unique mail : une pièce-jointe signalant la sortie d’un livre assez sévère sur le géant de l’eau.

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Tout le sel de l’affaire vient en fait de l’auteur de l’ouvrage évoqué dans le mail. Il s’agit de Jean-Luc Touly, salarié de Veolia, pourfendeur des mauvaises manières sur les marchés de l’eau, et accessoirement administrateur d’Anticor, l’ONG de lutte contre la corruption. Dans son dernier ouvrage retraçant ses combats, Le vrai pouvoir d’un citoyen, : coécrit avec les journalistes Roger Langlet et Achille du Genestoux, le groupe Veolia en prend à nouveau pour son grade.

Touly, syndicaliste FO dans la même entreprise, militant d’un service public de l’eau, par ailleurs conseiller régional Europe écologie-Les Verts en Île-de-France, avait déjà commis en 2005 L’eau de Vivendi : les vérités inavouables, dénonçant les turpitudes de l’ex-Générale des Eaux.

Selon le courrier parvenu dès le lendemain aux syndicalistes, le mail aurait un objectif purement publicitaire à l’égard d’un livre trop critique à son égard :

CLiquez sur l'image pour accéder aux deux pages du PDF

Le même argument avait été présenté par deux fois, et avait été suivi des mêmes effets. Le 30 novembre 2010, déjà, c’était pour avoir conseillé le film Water makes money, évoquant les méthodes des géants français de l’eau à l’étranger, que le syndicat Force ouvrière avait été privé de messagerie.

Secrétaire général de FO Île-de-France Centre chez Veolia Eau, Christophe Gandillon y voit une entrave à l’action syndicale :

Le courrier qui nous est parvenu porte un jugement de valeur sur le bouquin : communiquer avec les salariés du groupe, que ça soit sur l’actualité sociale ou celle de notre secteur fait partie de nos prérogatives. Le dernier article que j’ai signalé était un papier publié sur le site de Marianne, il portait sur l’application de la loi Tepa dans les entreprises et ça n’a posé aucun problème. Mais il y a une forme de culte du secret dans cette entreprise qui se heurte à la réalité des échanges entre les salariés.

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Confidentialité

Chargé de la défense de Veolia, le cabinet d’avocats Pérol, Raymond, Khanna et associés est également en charge de tous les dossiers sociaux de Veolia Eau. Maître Raymond, représentant l’entreprise devant le juge des référés lors de l’audience du 5 juin à Paris, n’était pas joignable au moment de la rédaction de cet article.

Pour les syndicalistes, l’action en justice est de pure forme : convoqué il y a un mois, la confrontation s’est déroulé deux jours avant la fin théorique de la suspension et la délibération ne sera rendue que le 26 juin prochain ! Avocat de Force ouvrière, maître Burget plaide sur le fond :

D’une part, nous attaquons sur le caractère injustifié du motif de suspension. Ensuite, il s’agit d’une mesure discriminatoire puisque, à notre connaissance, ces sanctions n’ont jamais été prononcées à l’égard d’un autre syndicat du groupe.

La décision prise par Veolia s’appuie selon le courrier sur un accord signé par les syndicats. Or, selon certains représentants, un problème de confidentialité s’ajouterait aux problèmes soulevés devant le tribunal : le litige ne porte pas sur le mail lui-même mais sur le document qui lui était joint. Autrement dit, et selon ces salariés, la société aurait outrepassé ses droits en fouillant dans les correspondances syndicales internes.

À l’heure où nous écrivons ces lignes, selon les représentants FO, la messagerie n’a toujours pas été rétablie.


Photo par M@X [CC-byncnd]

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Ce qu’Internet a changé dans le travail (et la vie) des écrivains http://owni.fr/2011/01/17/ce-quinternet-a-change-dans-le-travail-et-la-vie-des-ecrivains/ http://owni.fr/2011/01/17/ce-quinternet-a-change-dans-le-travail-et-la-vie-des-ecrivains/#comments Mon, 17 Jan 2011 18:08:30 +0000 raphaelle leyris http://owni.fr/?p=42815

Cet article a initialement été publié sur Rue89

Même Modiano ! Oui, même Patrick Modiano, collectionneur obsessionnel d’annuaires anciens, chasseur d’ombres d’un bottin poussiéreux à l’autre, a fini par se mettre à Internet.On s’en fiche ? Pas ses lecteurs : le Web a modifié l’imaginaire de l’écrivain. Ou disons, au minimum, la fin de son roman « L’Horizon », paru en mars. Révolution modianienne : les gens ne s’évanouissent plus dans la nature. Même s’ils ont changé de pays trente ans plus tôt, on peut les retrouver d’un coup de Google.

A 65 ans, Patrick Modiano est sans doute l’un de derniers écrivains français à avoir découvert Internet. Mais, comme la plupart de ses confrères, cet outil, même s’il se dit peu fan, a chamboulé son univers mental.

« Entre solennité de la lettre et bavardage anodin du téléphone »

Après des années de tâtonnement, ce sont moins les épiphénomènes de la Toile que ses constantes qui travaillent les écrivains. Internaute forcené – il a deux blogs, l’un historique et l’autre plus récent, répond dans la journée à la plupart des mails qu’il reçoit – l’écrivain et médecin Martin Winckler évoque le « ressort fictionnel » que constituent les échanges par tchats et les mails, qu’il a déjà utilisés dans « Histoires en l’air », « La Trilogie Twain » et »« Le Chœur des femmes ».

Son confrère trentenaire Arnaud Cathrine développe :

En tant que romancier, c’est la prise de parole qui m’intéresse. Et le mail induit une manière de s’adresser à l’autre, quelque part entre la solennité de la lettre et le bavardage anodin du téléphone qui bouleverse complètement les cases. C’est fascinant.

J’ai effleuré la question dans mon dernier roman, “Le Journal intime de Benjamin Lorca”, mais je vais pousser l’expérimentation plus loin.

Il aura fallu du temps aux écrivains pour saisir les subtilités du courriel et comprendre qu’il ne s’agissait pas que d’une lettre reçue plus vite. Résultat : on aura subi une décennie de mauvais romans épistolaires par mails avant de pouvoir en lire, enfin, un bon.

« Quand souffle le vent du nord » de Daniel Glattauer a remporté un succès mondial. Qui s’explique, au-delà de sa belle histoire d’amour virtuelle, par la façon dont Daniel Glattauer s’empare réellement du média.

Il prend en compte les différents types de langage et d’adresses qui lui sont propres (plus grand proximité, intimité plus immédiate, échanges courts ou longs en fonction des circonstances…), et, surtout, sa temporalité.

Même si on ne s’en rend pas forcément compte dans la kitschissime bande-annonce concoctée par son éditeur français.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

« Avant, je passais un temps fou à la bibliothèque »

Si Internet s’installe dans l’univers mental des écrivains, il joue, chez beaucoup, un rôle à la fois plus prosaïque et fondamental. Son usage a révolutionné le travail de recherches, préalable à l’écriture. Et on ne parle pas seulement de Michel Houellebecq et de l’accusation de plagiat de Wikipédia portée contre lui . Il a répondu à la polémique.

Auteure de polars, Dominique Sylvain détaille les bouleversements induits dans son travail :

Lorsque j’ai commencé à écrire, en 1994, il fallait chercher les infos dans énormément d’endroits, interroger un nombre ahurissant de personnes. C’était coriace.

Maintenant, chaque fois que j’ai besoin de penser à un personnage, et de le visualiser dans son environnement, je vais sur Google Earth, et je me balade virtuellement dans le quartier. C’est d’autant plus nécessaire que je vis à Tokyo….

Pour un de mes romans, je devais me renseigner sur la Brigade fluviale de Paris. Impossible de parler à des policiers par la voie normale. Mais via un forum, je suis tombé sur un plongeur de la Fluviale en année sabbatique qui n’était pas soumis au devoir de réserve, et a pu m’expliquer, entre autres, comment on va repêcher un corps au fond de la Seine.

Ce n’est pas Internet contre les livres ou les rencontres : il y a un va-et-vient permanent.

Arnaud Cathrine poursuit :

« Avant, disons jusqu’à il y a sept ans, je passais un temps fou à la bibliothèque de Beaubourg ou à la BNF. Maintenant, je n’y vais que très peu. En ce moment, j’écris un texte sur mes livres de chevet, parmi lesquels il y a les œuvres de la dramaturge britannique Sarah Kane.

Sur DailyMotion, je peux retrouver des extraits entiers de différentes mises en scène. C’est vertigineux.

Mais ça l’est aussi de se rendre compte qu’il y a des “ trous ” sur Internet, ou que certains ouvrages sont introuvables même sur PriceMinister. Dans ces cas-là, je retourne à la bibliothèque… »

« J’ai préféré me protéger, et protéger mon écriture »

Même si Internet les a amené à rester plus chez eux, l’outil a sorti les écrivains de leur proverbiale solitude. Quand Geneviève Brisac « [se] sent seule au monde et pense que personne ne [la] lit », elle se rassure grâce aux échanges qu’elle a avec ses lecteurs (« enfin, des lectrices à 80% ») par mail ou via Facebook.

Dominique Sylvain, installée au Japon, se sert du site 813.fr pour rester en contact « permanent » avec la communauté des polardeux français. Elle trouve par ailleurs dans les échanges cybernétiques avec ses lecteurs « une vraie source d’énergie » :

Les rapports sont moins superficiels qu’on ne le dit, on va à l’essentiel.

Arnaud Cathrine se méfie de « l’hystérisation des rapports » que cette plus grande proximité auteur/lecteur apparente peut induire. Quand Emmanuelle Pagano, qui avait ouvert un blog, entre autres, parce qu’elle habitait dans un « endroit très isolé », se réjouit qu’Internet soit « un horizon de l’écriture par les liaisons, les connexions et les lectures. Il permet de lier, de lire et de relire ».

Cela dit, elle a fermé son blog, qu’elle concevait comme une « fabrique d’écriture » où elle exposait ses idées et documents de travail :

Certaines choses ont été mal interprétées, alors j’ai préféré me protéger, et protéger mon écriture. Sur Internet, il n’y a pas assez de distanciation, tout est pris au pied de la lettre.

Limite de l’exposition et du partage…

« Internet relance des formes de littératures populaires »

A côté de ces auteurs « mainstream », qui utilisent intensivement Internet mais continuent d’être publiés sur papier, il existe une branche de littérature d’avant-garde, qui ne peut exister sans le support du Web.

Professeur de littérature à Grenoble III, auteur de « Machines à écrire », « Littérature et technologie du XIXe au XXIe siècle », Isabelle Krzywkowski s’appuie sur l’exemple de « La Disparition du général Proust » de Jean-Pierre Balpe, texte proliférant, en constant développement, pour expliquer :

Internet est en train de relancer des formes de littératures populaires extraordinaires. Il y a une inventivité impressionnante qui est liée à l’évolution de l’outil.

Avec une conséquence :

Tout le monde peut se saisir de l’écriture.

Au temps pour les vieux réacs persuadés qu’Internet va tuer la littérature.

Article initialement publié sur Rue89

Image CC FlickR par Anonymous Account

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